La Ville Habitée

Parce qu'il faut permettre au citoyen d'exprimer et de confronter ses idées politiques.
La Ville Habitée

La Ville Habitée

Messagepar La Ville Habitée » mar. 15 sept. 2009 12:18

LE POINT DE VUE D'UN TÉMOIN

Il nous faut applaudir le préfet Alain Bidou, le maire Dominique Baudis, le ministre de l’intérieur Charles Pasqua et le premier ministre Édouard Balladur.
Face à une initiative associative susceptible de faire avancer la politique de la ville vers une solidarité populaire fondée sur la culture d’un lieu de rencontre ouvert à tous, ces gens ont opposé les C.R.S ; on ne voit pas très bien ce qu’il y aurait à espérer d’un tel gouvernement ni d’un tel maire.
Bref rappel des faits : samedi 18 mars (ndlr : 1995), un collectif d’associations réquisitionne l’ancienne école de commerce de Toulouse et en fait un lieu de solidarité et d’expression culturelle : Musique, peinture, photo, plasticiens, écriture quant à l’art, logement et insertion de SDF quant à la solidarité.
Dimanche à sept heures du matin, 400 C.R.S (Compagnie Républicaine de “Sécurité”) débarquent et font évacuer manu militari les 150 personnes qui se trouvaient dans les lieux.
La future Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) aura d’abord servi de lieu de répression culturelle certifié conforme par l’état.

Rétrospective

La Ville Habitée, qu’est-ce c’est ? C’est le nom qu’un collectif d’associations choisit de donner à son mouvement revendicatif.
L’expression signifiait que la ville n’était pas habitée par les citoyens mais par le pouvoir, que l’expression populaire n’était pas reconnue comme une culture à part entière et que la liberté d’expression avait encore beaucoup de chemin à faire dans la «démocratie» française.
S’appuyant sur la double revendication du droit au logement des démunis et du droit à l’expression populaire, ce collectif d’associations avait préparé la réquisition de l’hôtel Sain-Jean, ancienne école de commerce au 30 rue de la Dalbade à Toulouse.
Je cite le tract : «Nous voulons une ville à vivre et non à consommer./ “La ville habitée” : un lieu de rencontre et d’utopie où citoyens, artistes, militants associatifs et mal logés explorent les possibles. En logeant les familles et des individus, nous demandons, de façon solidaire, l’application de la loi de réquisition. Nous créons un espace avec des ateliers d’artistes, des locaux associatifs, des logements, des manifestations culturelles et artistiques.»
Donc, le 18 mars, la Ville Habitée ouvrait ses portes aux individus, visiteurs, artistes, mal logés, citoyens. Sur plus de mille mètres carrés, il y avait de quoi faire, et on faisait. En moins de 24 heures et grâce aux associations loi 1901, ce lieu était devenu un lieu de vie dans le sens le plus créatif du terme : L’hôtel Saint-Jean n’avait rien à envier à la célèbre cour des miracles. On sentait un vent de passion parcourir les lieux.
Mais, le lendemain, 400 CRS détournés d’un meeting de M. Le Pen venaient mettre un peu d’ordre, sur l’ordre du gouvernement que la démocratie appliquée effrayait quelque peu.
Par la suite le collectif perdit de son unité. Le DAL repartit sur ses grands chevaux et l’anecdote fut classée... à suivre

La Ville Habitée

L'avant-projet de La Ville Habitée

Messagepar La Ville Habitée » mar. 15 sept. 2009 12:21

AVANT-PROJET D’UNE EXPÉRIENCE INTERASSOCIATIVE
AUTOUR DE L’OCCUPATION D’UN LIEU SUR TOULOUSE

La VILLE habitée

un Collectif d’associations :

Planète en Danger
Droit Au Logement 31
Ras L’Front 31
Lucette Omnibus

Motivations Page 2
Des Axes indissociables Page 3
Lieu de Parole Page 4 et 5
La place de l’Art et de la Culture Page 6 et 7
Le Logement Page 8 et 9


La VILLE habitée

A l’heure bleue télévisuelle, celle qui rime avec consensuelle, la ville se vide de ses autos et de ses passants.
Les citoyens ont rendez-vous avec le miel. En famille ou en solo, droit dans l’oeil du cyclope, c’est le tête à tête avec PPDA, l’anesthésie publicitaire, l’opium de la Française des jeux. Dehors la ville se vide de ses autos
et de ses passants. Les rues, les places, les trottoirs, autrefois lieu de rencontre, d’échange, de discussion sont devenus des lieux de circulation obligatoire.
Circulez, circulez, la société de consommation ne supporte par le surplace, la déambulation, l’errance. Flux de voitures sur ruban noir, flux de piétons sur les trottoirs.

Temps mort. Silence insupportable dans le bruit et la fureur.

Sans distance, sans arrêt, sans pose, sans silence, la musique de la vie entraînée dans une accélération centrifuge (vers où, vers quoi ?) devient un bruit de fond uniforme, informe, oppressant, stressant ; un disque rayé qui ne nous laisse plus le temps de penser.
A l’heure de l’inaliénable liberté individuelle, un flâneur est un chômeur (il n’est pas pressé ! s’il a le temps de ne pas courir, c’est qu’il n’a rien d’autre à faire !).
Il est d’autres flux, invisibles ceux-là, qui procèdent de la même idée totalitaire de la vitesse. Flux d’argent électronique, flux des réseaux de télésurveillance, concentré de flux en autoroute de l’information.
Bienvenue dans le village mondial, qui ne connait ni frontières ni repos, où le diktat des actifs ne laisse pas de place à un autre modèle. Cours ou crève, tant pis pour ceux qui traînent la patte.

Au siècle de la vitesse, de la mondialisation, de la montée de la complexité, du règne
de la technocratie, de l’amalgame entre haute technologie et progrès, de la manipulation publicitaire ; quand le modèle occidental, démocratiquo médiatique, libre-échangiste, capitaliste,
règne sans partage sur la planète.
N’est-ce pas un peu désuet de se pencher sur la ville ?

La ville est le lieu où nos vies prennent corps.

Elle est notre quotidien, le théâtre de nos amours, le terrain de jeu de nos enfants, la terrasse de nos cafés. Mais elle est aussi, la fumée de nos usines, le massacre de nos vieux quartiers, l’insupportable de nos exclusions.

Cette ville ne nous convient pas :
la rencontre y est devenue danger,
la solidarité, promiscuité qui dérange,
l’espace d’expression, un lieu de consommation outrancier,
la création, affaire de marchands,
l’espace de vie un coin exigu trop cher, trop froid, trop inhumain.

Mais nous restons des citadins désireux de nous battre ici dans notre ville, Toulouse, pour exister, vivre, respirer. Nous voulons en être les acteurs citoyens, ici et maintenant.
Face à une crise grave des valeurs qui n’offre comme réponse que le repli sur soi de l’individualisme et comme but l’accumulation matérielle, Toulouse, ville du sud et cité contemporaine, devrait être une des matrices du débat d’idées, de la création. Elle devrait cultiver son identité, affirmer et vivre sa singularité, qui n’est certainement pas la haute technologie et les opérations de prestige dont la presse municipale nous abreuve.

En fait, elle est devenue pour beaucoup un lieu de passage obligé, un lieu de consommation aseptisé. Il est urgent d’y reconquérir un espace d’expression, de création, de retrouver une vie sociale riche et bouillonnante.

La vie a besoin d’espace.

Au détriment de l’idée même d’intérêt général, la ville est offerte à la spéculation immobilière, les miettes d’espace public restant sont utilisées comme instrument de pouvoir. Il est grave que la dimension sociale, culturelle, que la création, le débat d’idées ne trouvent de place aujourd’hui à Toulouse qu’en devenant l’enjeu de séduction politique et de luttes partisanes.

Pour toutes ces raisons, nous croyons nécessaire d’initier à Toulouse une expérience. En occupant un lieu, nous expérimenterons l’utopie, où citoyens, artistes, militants seront ensemble pour explorer les possibles.

Une ville à vivre où chacun aurait sa place et de la place.

Un toit pour tous, des ateliers pour artistes, des locaux pour les associations, des lieux publics détachés des intérêts marchands.

-> 4 AXES INDISSOCIABLES

Cette expérience s’articulera autour de quatre axes fondamentaux à défendre et à revendiquer.

- 1 La place de l’Art et de la Culture.

Dans une société dite du temps libre, (pour ceux qui n’en sont pas exclus) les pratiques créatrices et culturelles devraient aider tout un chacun à définir ses véritables aspirations.
Des aspirations qui ne sont très certainement pas le culte de l’argent et de l’accumulation des biens.

Or aujourd’hui, l’art est devenu une marchandise. La culture est soit l’affaire d’une élite, soit un exutoire tapageur pour amuser les masses.
Art et culture sont essentiels à toute civilisation. Nourriture de l’esprit, ils fondent notre humanité. Nous entendons revendiquer la place de l’artiste dans la cité, l’accès à la culture plurielle, non soumise au pouvoir et à la censure de l’argent, mais comme moyen de notre liberté et richesse intellectuelle.

- 2 Le milieu associatif

Les associations sont un des lieux de l’expression démocratique du citoyen ; elles sont garantes de l’existence d’un contre pouvoir culturel et politique face à l’idéologie dominante.

École de la citoyenneté au quotidien, elles se doivent de favoriser l’auto-organisation et la libre expression des individus.

A Toulouse, le réseau associatif, dense et riche de sa diversité, ne peut espérer fonctionner correctement sans moyens.

Pourquoi faut-il rentrer dans la vitrine culturelle dominante, acquiescer au consensus mou de la vie publique ou avoir instauré un rapport de force pour obtenir quelques subsides ?
Pourquoi trop peu de salle publique gratuite, de locaux pour exister, travailler, s’exprimer ?
Alors que dans d’autres villes des locaux sont mis à disposition, Toulouse continue de faire la sourde oreille.

Nous pensons que les pouvoirs publics se doivent de mettre à disposition des associations et des artistes des locaux gérés par eux-mêmes. En occupant ce lieu nous souhaitons participer de façon active au débat nécessaire à l’élaboration de cette revendication.

Ce point ne fait pas l’objet d’un développement plus poussé dans la suite de ce dossier.

- 3 Le logement

Le minimum vital - le droit au logement - n’est pas assuré à Toulouse en 1995.
Une solution d’urgence pour une situation urgente : l’application de la loi de 1945 sur la réquisition des logements vides.

En logeant provisoirement des familles ou des individus en détresse, nous demandons de façon solidaire l’application de cette loi. La dynamique de ce lieu doit aussi permettre l’accès à un logement pour ces familles et/ou individus.

- 4 Le lieu de parole

Retrouver et éprouver le plaisir de la rencontre, s’en nourrir et s’y construire. Comment faire sans la tchatche ?
La parole nous échappe, et cette expérience sera l’occasion de décloisonner la vie sociale, culturelle, artistique et militante à Toulouse.
Nous voulons vivre la multiplicité de nos points de vue comme condition de notre richesse, et faire naître une dynamique qui nous échappe.

Nous choisissons donc de poser ensemble un acte pour créer de nouvelles solidarités et se faire entendre. L’ensemble de cette action se fera de façon non-violente.

-> LIEU DE PAROLE

Si la ville a été abondamment pensée, objet de nombreuses utopies architecturales, aujourd’hui même l’élite s’est tue, ne pense plus, ne parle plus la ville.
La ville est muette.
Au gré des opportunités, des opérations de prestige, des spéculations diverses et des enjeux politiques, la ville devient le résultat d’un assemblage incohérent (généralement à base de parallélépipèdes rectangles, debout ou couchés), oeuvre d’architectes vedettes dont les buts et ceux de leurs commanditaires sont prioritairement l’originalité, le prestige, la trace qu’il faut laisser ou le meilleur rapport financier au m2.

En tout cas, elle est tout sauf le résultat, l’expression du désir de ceux qui l’habitent.
“Si la ville est muette, c’est que la masse des gens qui l’habitent ne parle plus guère”. Michel Ragon.

Pourquoi s’étonner qu’une ville qui ne parle pas devienne droite, inhumaine, qu’il y manque le rêve, l’imagination, l’insolite, la poésie ?
Vitesse, échange, consommation : oui, mais parole : non.

Prendre le temps de la parole sera l’une des priorités de ce projet. Une ville habitée par des gens qui parlent, qui se parlent.
Parler pour ne pas laisser la ville se dessiner, se construire sans nous, sans nos envies, nos désirs, nos rêves, nos rythmes. Parler pour arrêter de subir la ville.
Parler de cet espace qui nous manque : lequel, pourquoi faire, avec qui ?
Parler de la vie en somme. Arriver à formuler de quelle vie nous rêvons et peut-être alors faire la VILLE que nous aimons.

L’acte que nous posons en nous installant publiquement dans un lieu revendiqué est un acte de parole, un cri dans une ville qui nous étouffe.
Un cri pour des maux - l’indifférence, la peur de l’autre.
Des mots pour la rencontre, l’échange, la richesse et la diversité.

Nous revendiquons dans ce lieu la validité des paroles plastiques, musicales, théâtrales... Nous nous donnerons les moyens sur le lieu d’un espace (suffisamment grand pour accueillir 80 personnes de façon confortable), destiné à recueillir et formaliser la parole orale et le texte qui la prolonge.

Cet espace spécifique a deux fonctions :

1) Permettre le fonctionnement de l’expérience.

Il constituera le coeur du projet, en regroupant sous des formes accessibles à tous (panneaux, dossiers, images...) tous les documents (textes, affiches, coupures de presse...) relatifs à l’expérience elle-même. Cet espace sera en quelque sorte la mémoire vive de l’expérience et devra permettre à tout un chacun d’en saisir le sens, les objectifs et les motivations. Ceci afin d’en permettre l’appropriation par des acteurs nouveaux, de susciter des remarques, des critiques et donc l’émergence d’idées (?). L’un des principaux objectifs est donc la transparence : pour éviter que l’expérience soit confisquée ou dirigée par quelques uns qui possèdent l’information, les objectifs, etc.

Ce sera évidemment le lieu des prises de décisions et de débats, en ce qui concerne l’organisation de la vie de l’espace global.

2) Susciter les débats, les nourrir, les faire avancer.

Rendre la parole possible est un enjeu que l’on sait difficile. Il demandera sur place une écoute et un investissement conséquents.

L’espace précédemment défini va être de par sa fonction le lieu idéal de toutes les discussions. Nous souhaitons que tous ceux qui sont lassés par le discours traditionnel, bien léché, brillant, riche de références, puissent trouver les moyens de leur expression. Que leurs “paroles” viennent alimenter l’échange et amènent des points de vue originaux, et non marginaux comme on les qualifie trop souvent aujourd’hui.

La parole a besoin de se construire. Conscients des limites d’une parole circulaire ou trop utilitaire, notre souci sera de l’élargir en permettant d’inscrire des sujets de débats, en proposant des soirées, en invitant des paroles autres.

La multiplicité et la diversité des points de vue ne devront pas être pour nous un handicap, mais au contraire un but qui fera prendre au projet sa véritable dimension d’expérience et de laboratoire d’idées. Cette diversité sera garante de notre richesse et la condition de rebondissements concrets dont nous n’avons pas idée aujourd’hui.

-> LA PLACE DE L’ART ET DE LA CULTURE

Le XXème siècle a vu l’apparition de l’équation art = marchandise. L’artiste est depuis longtemps déjà prisonnier des lois du marché et du culte de la marchandise.

Beaucoup malheureusement cèdent aux contraintes économiques : être constant dans sa production, dans ses thèmes, son style, être un produit en somme que l’on peut discuter, comparer, acheter, vendre.
Pourtant être artiste pour nous, c’est avant tout s’adresser à un public libre d’accepter ou de refuser l’oeuvre : le public n’est pas le client auquel il faut plaire, auquel il faut vendre.
L’artiste est celui qui cherche avec tout son être et trouve une expression qui parle à l’autre. Ce n’est pas obligatoirement d’ailleurs dans le sens qu’il avait imaginé au départ. D’où la difficulté de rationaliser l’art. Son objet c’est l’être, l’artiste produit de l’émotion, du sentiment, de l’idée et non de l’avoir, du paraître. Il n’est pas un amuseur, censé faire oublier la grisaille. Face aux malaises sociaux, à la quête des valeurs, à l’échec des dogmes politiques et religieux, l’artiste a le pouvoir de réveiller l’homme d’aujourd’hui, de le redynamiser, et l’amener à retrouver ses vraies aspirations, qui ne sont certainement pas de consommer toujours plus et n’importe quoi.
“C’est contre les valeurs d’argent et de profit que se sont constituées initialement les univers littéraires et artistiques”. Pierre Bourdieu.

Les institutions de Toulouse privilégient les grandes expositions, les grands travaux vitrines, les artistes de renom, ceux qui flattent un prestige urbain.
Les autres jeunes ou moins jeunes, petits poissons perdus dans l’océan de l’art, ne sont pas pris en compte ou reçoivent parfois (pour les plus chanceux), quelques miettes, histoire de calmer le peuple.
On n’aperçoit jamais les responsables politiques chargés des gestions culturelles ailleurs que dans les manifestations, lieux ou événements qu’ils ont eux-mêmes initiés ou appuyés.
Force est de constater une priorité à la création qui ne considère que les professionnels de l’art et produit finalement des rentes de situations.
Les institutions sont résolument fermées à toute aventure, à tout nouveau partenaire, à tout ce qui viendrait souiller la “pureté originelle de leur mission”.
Dans les discours on parle beaucoup d’aide à la création, de réduction des inégalités culturelles. Les artistes pensionnés sont invités à éduquer le peuple (exemple du métro).
Pendant ce temps, les pratiques artistiques qui émergent de ce peuple sont niées, trop peu achevées, trop amateur, etc.
Il est clair que pour les institutions, il existe d’un côté ceux qui savent ce qu’est l’art, ce qu’il n’est pas, et ceux qu’il faut éduquer afin de les amener à des pratiques sociales, culturelles satisfaisantes.

Les créateurs et artistes toulousains existent ; ils ont des choses à dire et à montrer.
Il est urgent qu’ils soient écoutés et considérés comme des interlocuteurs responsables.
Il est urgent que l’artiste et la culture trouvent leurs places dans la société, et que l’artiste revendique les moyens de son existence.

Or la situation à Toulouse est désastreuse.

Toulouse est totalement dépourvue d’ateliers d’artistes municipaux. Aucune structure n’a été mise en place, par qui que ce soit (Mairie, DRAC, Conseil Général, Conseil Régional...), pour permettre aux artistes de travailler dans des ateliers, des salles de répétition convenables.
L’existence des ateliers se heurte aux intérêts de la spéculation immobilière.
Il est plus rentable aujourd’hui de réaliser des appartements très chers que de conserver ou louer des espaces ateliers.
Le statut d’artiste est précaire. Peu souvent solvable, il ne répond pas aux normes habituelles de location.

Contrairement à beaucoup de grandes villes (Paris, Marseille, Lyon...), les friches industrielles toulousaines, vieilles usines, entrepôts désaffectés, ... restent inexploitées. Non contents de ne pas être utilisées, elles sont peu à peu détruites par les intempéries et le vandalisme. Pourtant, elles pourraient être mises à la disposition d’artistes grâce à quelques aménagements modestes.
Encore une fois, rien n’a été fait pour permettre de gérer convenablement ces lieux au potentiel énorme : lieux de travail, lieux d’expression, de rencontres. Ce serait aussi un endroit de parole où pourraient être organisées des tables rondes sur l’art, le mécénat, l’enseignement... où artistes, industriels, politiques, sociologues, étudiants pourraient se rencontrer, se comprendre.
Il est urgent que les artistes toulousains s’organisent et en revendiquent la mise à disposition, la gestion.
Pourquoi les artistes s’impliquent dans l’expérience ?

Notre but n’est pas de revendiquer un statut de l’artiste institutionnalisé, d’agent subventionné. Il se peut que l’artiste soit encore et pour longtemps un marginal que sa passion dévore et qui rend difficile son statut d’acteur économique.
C’est peut-être là d’ailleurs une garantie de son authenticité.

Même si l’on peut créer avec rien (une feuille de papier et un stylo) ou à partir de déchets (récup-art), il n’empêche que l’espace est essentiel dans toutes les pratiques culturelles et artistiques.
Espace pour :
- entreposer des matériaux (sans matière première, on ne fait rien).
- travailler
- montrer, voire se rencontrer.
C’est cet espace dans la ville que nous revendiquons.

-> LE LOGEMENT

« Lutter contre le chômage et l’exclusion » :

Cette phrase est aujourd’hui sur toutes les lèvres, dans tous les discours. Un mot manque, qui fait toute la différence entre le chômage et l’exclusion : le mot Logement. Ou plutôt, entre le chômage et l’exclusion, il manque une étape cruciale : la perte du logement. Une grave crise du logement sévit dans les grandes agglomérations, occultée par la crise de l’emploi, qui focalise l’attention publique, Le domaine du logement n’a pas été épargné par la vague de dérèglementation, de “marchandisation” généralisée des années 80 : construction de logements en baisse, investissement massif sur le tertiaire, disparition du parc privé bon marché, spéculation, flambée des prix des loyers, accession à la propriété en panne, logement social fermé aux ménages à faibles ressources. Le logement est devenu très cher, rare et difficile d’accès pour une partie croissante de la population.
La crise du logement est la cause principale de la rapidité et de la violence, de la régression sociale que nous connaissons aujourd’hui.
Exclusion radicale car si on vit difficilement sans travail, on ne peut vivre sans logement.

Le logement est vital.
En effet, l’absence de logement, c’est à court terme :
l’éclatement de la cellule familiale, le “placement” éventuel des enfants, l’impossibilité de trouver du travail, les solutions temporaires d’hébergement, le “provisoire permanent”, la dépendance aux services sociaux, aux associations, l’errance urbaine, l’instabilité sans fin, l’absence d’espace privé, d’intimité, de stabilité, d’autonomie, les problèmes de santé, le retour des maladies sociales (tuberculose, saturnisme), l’aggravation de l’alcoolisme, les troubles du comportement, pas de courrier, pas de correspondance, de téléphone, de communication, l’impossibilité de maintenir des liens sociaux et familiaux, la rupture de sociabilité, la perte de domiciliation donc l’arrêt des démarches administratives, le “fin de droits”, la déchéance de la citoyenneté par la suppression de “fait” du droit de vote, les troubles de l’identité, la dispersion, la perte des repères fondamentaux d’espace et de temps... au bout, la mort dehors, seul...

Quelques chiffres :

- 21000 logements vacants sur l’agglomération toulousaine (chiffres INSEE 90).
- 8136 demandes de logements HLM non satisfaites.
- 1/4 des demandes est lié à l’inadaptation des logements (souvent trop petits).
- Moins de 5% des logements HLM sont en centre ville, insérés dans un tissu urbain.
Les quatre zones accessibles pour la population la plus défavorisée sont :
- Mirail
- Rive gauche (Faourette, Bagatelle).
- Sud/Sud-est (Empalot).
- Nord (Les Izards).

Quelques remarques :

Le retard accumulé pour le logement des exclus est important. Les logements HLM dits PLAI (Prêt Locatif Adapté à l’Insertion), créés pour les bénéficiaires du RMI ne combleront pas ce retard. Pire, il est prévu 20 000 logements de ce type en France, alors que l’on compte 100 000 nouveaux bénéficiaires du RMI en rythme annuel.

Surtout, l’économie prime : selon la CNAF (Caisse Nationale des Allocations Familiales) les fonds budgettés actuellement ne sont pas utilisés en totalité.
Constat lucide : la Puissance Publique utilise les associations caritatives pour le traitement en “surface” (l’urgence) d’un problème d’ordre social et politique, tout en sachant que celles-ci n’ont en aucun cas les moyens de le résoudre.
La charité publique a ses limites. La solution ne peut être que politique, au sens noble du terme. La politique ultra-libérale de ces dernières années a amené ce paradoxe : la présence simultanée des sans-logis, des mal-logés et des logements vides.

En logeant de façon solidaire dans ce lieu quelques familles en difficultés, nous entendons dénoncer la situation inadmissible de centaines de familles et individus sur Toulouse qui sont privés du minimum : un toit. La solution d’urgence est aujourd’hui la réquisition, avec l’application de l’ordonnance de 45. La seule application de cette ordonnance ne sera pas satisfaisante. Pour ne pas entériner la situation actuelle, chacun doit faire face à ses responsabilités.
A moyen terme, nous demandons aux citoyens, aux pouvoirs publics, aux architectes et aux promoteurs de penser le logement autrement, de mener une réflexion et d’apporter des réponses.

La Ville Habitée

Commentaires, éclaircissements, bilan de Planète en danger

Messagepar La Ville Habitée » mar. 15 sept. 2009 12:25

LA VILLE HABITEE
COMMENTAIRES, ECLAIRCISSEMENTS, BILAN DE PLANETE EN DANGER.


A L’ORIGINE...
- A l’origine est l’insatisfaction de notre vagabondage, de notre quotidien qui se heurte à l’hostilité croissante du paysage urbain ( architecture, vigiles, caméras de surveillances, agressions publicitaires ), qui se heurte aussi à sa dégradation ( misère, solitude, détresse, violence, ghetto...). La poésie de notre ville est mise à mal par un urbanisme inhumain résultat de logiques et expressions d’intérêts qui ne sont pas les nôtres. L’espace public est de plus en plus assujetti à l’espace marchand.
-A l’origine, la certitude du potentiel énorme, en termes d’énergie et d’inventivité, que représente le tissu associatif toulousain, et ce paradoxe de ce milieu riche et vivant, incapable semble-t-il, de formuler une critique sociale pertinente, alors que nous ne doutons pas qu’elle est le moteur sous-jacent des énergies considérables qui s’y déploient.
-A l’origine est l’existence d’un milieu artistique ou culturel particulièrement dense, qui étouffe et qui lui non plus ne formule pas vraiment la ou les critiques ( la dimension politique ) qui pourtant s’exprime de façon récurrente au travers de ses réalisations et initiatives.
-A l’origine encore, le sentiment que ces deux milieux qui s’organisent autour de pratiques collectives ( même si cela est moins vrai pour le milieu culturel que pour le milieu militant ), se rencontrent peu et rencontrent difficilement le public plus large, l’homme de la rue.

UN DESIR...
Aider à la rencontre véritable de ces deux milieux, mais aussi permettre au tout un chacun de découvrir et de participer aux activités des uns et des autres.

UNE INTUITION...
Le sentiment que de nouvelles formes d’organisation, de nouvelles pratiques, de nouvelles énergies et un autre niveau de critique pouvait résulter de la rencontre de ces deux milieux.

UN CONTEXTE...
En 1993, le projet autour de l’ancienne chapelle 36 rue D. Casanova, qui porte en lui ce désir et cette intuition ( cf: Avant-projet de 1993 ), est confronté à une réalité difficile.
-Le conflit qui nous oppose au propriétaire de ce lieu et la perspective de la signature d’un bail se traduisent par le gel des activités publiques sur ce site.
-Au travers de la petite expérience que nous accumulons sur ce lieu, à travers la réalité des envies et imaginaires qu’il éveille chez divers groupes, et au travers de notre prise de conscience de ses limites ( contraintes d’espace, de moyens, de sécurité, nuisances pour le voisinage, etc), nous mesurons que ce lieu est à la fois trop grand face à nos modestes moyens, et trop petit pour qu’il accueille sans problème d’autres groupes. Nous mesurons que la rencontre sur ce site doit impérativement être organisée, pensée, réfléchie, sous peine que l’autre ne se transforme en une menace, une gêne, au lieu d’être source d’enrichissement.

LE CATALYSEUR...
Au mois d’avril/mai 1994, quelques membres de planète en Danger découvrent un nouveau lieu « abandonné », immense, beau, séduisant : l’ancienne faculté de pharmacie sur les allées J.Guesdes ( toujours inutilisée à ce jour). Ils croisent au cours de leurs nombreuses visites de ce site des membres de Lucette Omnibus et de l’Atelier des Arpètes. Ce lieu plaît à tous, trés vite né le désir d’y réaliser un événement.

LE PROJET.
Rassembler sur Toulouse ceux qui agissent et animent cette ville loin des schémas classiques ( lutte pour le pouvoir, recherche du profit ) sans parvenir à l’aimer vraiment, en critiquant la marchandisation de nos existences autour d’un thème central : l’espace urbain.
La Ville Habitée, c’était l’envie de voir si de nouvelles pratiques, de nouvelles exigences, de nouvelles formes d’organisation de solidarité d’échange, n’attendaient pas le préalable de cette rencontre pour émerger.
La Ville Habitée sera définie comme l’exploration des possibles, de la rencontre et de la confrontation de nos potentialités, de nos réflexions, de nos différences, au travers de la réappropriation d’un espace provisoirement inutile. Nous voulions signifier notre volonté d’être acteur de la vie sociale et culturelle de cette cité.
« Elle (la ville) est devenue pour beaucoup un lieu de passage obligé, un lieu de consommation aseptisé. Il est urgent d’y reconquérir un espace d’expression, de création, de retrouver une vie sociale riche et bouillonnante. La vie a besoin d’espace. ...Nous croyons nécessaire d’initier à Toulouse une expérience.
En occupant un lieu, nous expérimenterons l’utopie, où citoyens, artistes, militants seront ensembles pour explorer les possibles. ». (Extrait du dossier « La Ville Habitée », cf: annexe).
C’est afin de ne pas reproduire le système hégémonique d’une pensée qui nous opprime, nous insistions sur la dimension d’expérience de ce projet : limité dans le temps et l’espace, étape ou préalable vers autre chose, vers l’utopie.

POURQUOI 4 ASSOCIATIONS ?
Afin d’insister sur la démarche collective, nous souhaitions travailler avec des groupes constitués, c’est à dire des individus ayant déjà une pratique du fonctionnement collectif. Pourque ce projet soit ouvert sur l’imprévu et qu’il constitue une véritable expérience, nous pensions qu’il devait être porté par un groupe d’associations diversifiées dans leurs pratiques et leurs objectifs. Le fait que les 2 principales associations (de part leur taille), Planète en Danger et Ras l’Front, aient des préoccupations générales -l’anti-facisme est à nos yeux un sujet très large-constituait la garantie d’un projet ouvert et global. C’était l’assurance que puissent cohabiter et se rencontrer les pratiques de la lutte sociale (portées par le D.A.L.) et les pratiques artistiques ou culturelles ( portées par Lucette Omnibus) Ce collectif ne devait pas être élargi avant d’avoir pris le temps de nous entendre sur un projet dont nous serions les garants.

POURQUOI UNE EXPERIENCE SUR DEUX MOIS ?
Deux mois était la durée durant laquelle nous demandions aux associations partie-prenantes du projet d’être présentes et de s’investir sur le site qui serait occupé. Fixer dès le départ une durée à l’investissement de chacun était une façon de permettre à tous de mesurer et de choisir en connaissance de cause la nature et l’importance de son engagement. Deux mois nous paraissait raisonnable, car supportable, pour que chacun fasse l’effort de vivre l’expérience. C’était l’assurance qu’après la longue période de préparation de ce projet nous vivrions les uns et les autres, une aventure riche, séduisante, non seulement pour nous-mêmes mais aussi pour l’extérieur. Notre idée était que seule une expérience réellement enrichissante, vivante et séduisante, pouvait donner lieu à des prolongements de cette aventure avec d’autres que ceux qui fréquentent traditionnellement les réseaux organisés. C’était l’espoir d’ouvrir une brèche dans le fatalisme, la grisaille et le repli sur soi. Fixer une limite était aussi la perspective de réaliser un bilan qui laissait chacun totalement libre de poursuivre ou non l’aventure, et sous une ou des formes que nous espérions imprévues. Il n’était pas question pour nous de prétendre utiliser la dynamique que nous créerions, mais de créer une dynamique qui nous échappe, qui soit autonome, multiple, et se disperse, se propage dans toute la ville. La Ville Habitée était une tentative pour briser l’isolement des réseaux associatifs et des groupes de créateurs. Cette limite dans le temps était le signe de notre volonté de ne pas organiser les choses à la place des gens, de ne pas faire de l’occupation de ce lieu une fin en soi.
Si nous insistons autant sur ce point, c’est qu’il fait partie des choses essentielles qui étaient difficiles à exprimer en une ligne par écrit et qui sont restées verbales. Ce point n’apparaît pas sur le document de référence et participe, semble-t-il aujourd’hui encore, à de nombreux malentendus concernant les objectifs et la dimension d’expérience de ce projet.

LE RÔLE PARTICULIER DE PLANETE EN DANGER DANS CE PROJET.
Il faut dire ici quelques mots du rôle spécifique des membres de l’association Planète dans ce projet, de leurs rapports avec les milieux militants pour avoir une idée des conditions d’élaboration de ce projet.
L’histoire de Planète en Danger est celle d’actions sur des sujets et causes politiques. Ceci nous conduisit inévitablement à des tentatives volontaires ou involontaires de travailler avec des organisations ou partis politiques. Ces expériences nous ont vacciné. Il y a dans notre groupe beaucoup d’allergies aux pratiques et caractéristiques de nombre de ces boutiques que sont les organisations politiques. Si certaines ou certains d’entre nous ont de la sympathie pour telle organisation ou parti, le consensus absolu de l’association est la certitude que la forme d’organisation politique susceptible de nous satisfaire reste à inventer. Nous cherchons ailleurs, et cette recherche est l’un des ciments de ce groupe. L’expérience autour de la chapelle et l’expérience « Ville Habitée » participent de cette recherche.
La position de l’association Planète en Danger dans ce projet était très particulière, grâce à la pratique spécifique de cette association , « à la charnière du politique et de l’artistique », grâce aussi à la réflexion et à l’expérience autour du projet sur la chapelle. Les membres de Planète investis dans ce projet, jouèrent un rôle prépondérant dans l’écriture, et l’orientation de celui-ci. La conséquence était que contrairement à la plupart des 30 associations qui constituèrent le collectif « Ville Habitée », dont l’objet ou la pratique était en rapport direct avec un, voir deux axes de ce projet. Les membres de Planète en danger, étaient impliqués, par une réflexion ou par une action antérieure à ce projet dans chacun de ses quatre axes. Ils étaient donc particulièrement attachés à la notion d’expérience et sensibles à la notion de globalité, c’est à dire au caractère indissociable des 4 axes.
Une autre caractéristique du rôle particulier que joua l’association Planète est liée à la façon dont ses membres participèrent à la construction de la Ville Habitée. Nous avons quelques raisons de croire que l’originalité de ce projet résulte de son mode de conception, c’est à dire des individus d’horizons multiples, intimement investis dans sa réalisation. Tout le contraire d’une association d’intérêt où chacun est mandaté pour défendre les points de vue de son groupe d’origine. Autour de la table, tout était possible et chacun, en particulier à Planète, était libre de parole et d’opinions personnelles. Les membres de Planète intéressés par ce projet souhaitèrent tous pouvoir assister ou participer en direct aux débats, sans passer par l’intermédiaire systématique de la réunion spécifique de leur association. Plusieurs raisons à cela : tout d’abord cela concernait 7 ou 8 membres du groupe, ce qui restait gérable. Ensuite, ces 7 ou 8 personnes, très investies dans le projet, avaient en général infiniment plus de difficulté à être d’accord entre elles et à définir des positions consensuelles sur la Ville Habitée au sein de Planète en danger, qu’à travailler et se mettre d’accord avec les membres des trois autres associations qui élaborèrent ce projet. Les membres de Planète en Danger se sont retrouvés, d’un certain point de vue, impliqués plus à titre personnel qu’en tant que représentant de leur association.

LES CRAINTES DE RECUPERATION POLITIQUE.
Le D.A.L. 31 émis rapidement le souhait que l’association A.C! (Agir ensemble contre le chômage) se joigne aux quatre de base. L’opposition de Planète en Danger à cette requête créa visiblement des incompréhensions et des rancunes qui participèrent aux conflits ultérieurs. Les raisons de ce refus étaient les suivantes :
-Tout d’abord éviter un déséquilibre en faisant participer une deuxième association ( beaucoup plus importante, par le nombre de ses militants que le D.A.L 31 à l’époque), qui s’inscrivait aussi sur le terrain de la lutte sociale. Nous voulions éviter que les plus organisés, c’est à dire les militants politiques se retrouvent de fait à gérer et à construire ce projet. Comment éviter alors qu’il ne leurs ressemble, qu’ils ne transforment l’expérience en un combat classique.
-Une deuxième raison qui explique le malaise que créa cette proposition, tient à la vision que nous avions du groupe A.C.! à l’époque. Planète en Danger ayant travaillé et mené des actions sur le thème du chômage, avait de nombreux liens dans le milieu associatif investi sur ce thème. Des membres ou sympathisants de notre association avaient pris leurs distances avec l’association A.C!, car ils pensaient (peut-être à tort) que cette association ne disposait pas d’une pensée autonome. En clair, certains considéraient que l’association A.C! était sous l’influence d’organisations politiques.
Le fait que certaines « locomotives » du D.A.L.31 soient aussi membres de A.C! , assis à la table d’élaboration de la Ville Habitée et membre d’une organisation politique, elle-même bien représentée au sein de l’association Ras l’Front, créa un climat de méfiance et de suspicion tout à fait néfaste.
La condition d’une réelle originalité et d’une réelle sincérité de cette expérience était l’absence de structures ou groupes politiques quels qu’ils soient. Cette condition était clairement posée et acceptée par tous, dés l’origine du projet.
Pour Planète, cette condition était essentielle, afin d’éviter l’éternel kidnapping de tout ce qui de prés ou de loin, parce qu’il y a nombre, éveille les appétits des groupes politiques traditionnels, en particulier ceux de la mouvance marxiste. Pour ces derniers, de notre point de vue, le nombre est trop systématiquement synonyme d’un possible rapport de force qu’il faut utiliser, canaliser, orienter en fonction de la stratégie et des consignes de l’organisation.
La découverte progressive, au fur et à mesure de l’avancement du projet, de la présence d’une organisation politique clairement identifiable: la Ligue Communiste Révolutionnaire, posa un très sérieux problème au sein de l’association Planète. Le D.A.L. 31 posait un problème évident avec au minimum 2 sur 3 de ses adhérents (dont ses représentants, porte parole et leader impliqués dans la Ville Habitée), membres de cette organisation. Pour Ras l’Front, nous savions qu’une importante partie (de 30 à 50 % selon les avis) de ses membres étaient proches ou membres de cette même organisation. Par contre, nous ne savions pas quelle était son influence réelle face à d’autres groupes présents au sein de cette association.

LA QUERELLE AU SEIN DE PLANETE EN DANGER.
Au yeux de quelques membres de Planète en Danger, la découverte de la présence de la L. C. R. remettait en question le projet Ville Habitée. Certains préconisaient son abandon urgent. De toute façon, le fait que se pose ce problème hypothéquait, quelque soit son importance et sa réalité, l’originalité de ce projet. En effet, la discussion de ce problème se ferait au sein de notre association. Nous étions dés lors en train de reproduire un fonctionnement classique et désespérant dans le cadre de la Ville Habitée, celui d’un groupe qui va mobiliser son énergie à se défendre, à se protéger dans le cadre d’un projet où, au contraire, il s’agit de rompre avec ce type de schéma.
Nous tentâmes de prendre la température, et d’obtenir un avis de l’association sur ce problème, lors d’ un week-end de réflexion spécifique à la Ville Habitée qui a réuni une trentaine de nos membres courant janvier 1994 (avant l’élargissement du collectif). Il ne fut malheureusement pas possible d’obtenir un consensus sur la réalité de la menace et encore moins sur la démarche à adopter. En schématisant, deux positions se dégagèrent de cette réunion. Elles s’affronteraient au sein de Planète en Danger pendant les semaines qui suivirent :
-. L’une, minoritaire : considérait qu’il y avait des risques sérieux de récupération politique, avec des signes manifestes dans les orientations portées par le D.A.L 31 au sein du projet. Il fallait donc : soit stopper le projet, soit élaborer une stratégie de défense qui consistait (pour la plupart des partisans de cette tendance, elle-même divisée) à informer du constat (présence d’une organisation politique et crainte d’une « récupération ») toutes les associations susceptibles de s’investir dans ce projet.
-L’autre, majoritaire : décida de jouer la confiance, c’est à dire de considérer vrai et honnête le discours de nos interlocuteurs membres de la L.C.R. : « chaque individu investi dans le projet y est investi à titre personnel, ou au titre unique de l’association qu’il représente. ».
La conclusion de ce week-end de réflexion est que nous n’avions ni l’envie ni les moyens de nous lancer dans une bataille
avec le D.A.L. 31 ou avec la L.C.R.
Nous n’étions pas d’accord sur la réalité de la menace :
Pour la plupart des membres de Planète en Danger, à l’époque, la L.C.R. était un groupe parmi tant d’autres. Des gens dont nous ne partagions certainement pas les idées, mais qui avaient toutefois le mérite d’agir. Même en admettant que cette organisation ait élaboré une stratégie particulière, en quoi pouvaient-elle nuire au projet ? Ceux qui ne partageaient pas cette opinion, dressaient un tableau si terrible des pratiques de cette organisation, ( la désignant notamment comme spécialiste dans le détournement, le noyautage et la récupération ), que le dialogue était impossible. Gardons à l’esprit, si l’on veut comprendre le contexte, que certains travaillaient depuis plusieurs mois, et avaient des relations amicales, d’estime avec des personnes que certains au sein de Planète désignaient presque comme membres d’une secte dangereuse.
La raison qui fit que nous continuâmes le projet, était l’absolue certitude de tous : les inévitables tentatives de récupération seraient balayées par la puissance de cette aventure. Nous étions certains que face à la diversité et à la richesse des initiatives prévues et imprévues, les calculs et les stratégies ne trouveraient place.
Thérèse Toustou (présidente de Planète) et Marc Lefebvre (futur porte-parole de la Ville Habitée) prirent sur eux, d’informer de leurs craintes personnelles les membres de Lucette Omnibus, qu’ils avaient entraîné dans l’aventure. Cela avant la réunion décisive au Bijou le 31 janvier 1995 . Cette initiative leur sera longtemps reprochée au sein de l’association.
Le fait que certains membres de Planète soient en désaccord avec l’opinion ou les choix majoritaires du groupe et se démarquent de celui-ci, n’est pas quelque chose qui pose généralement problème au sein de notre association. Surtout pas dans le cadre de la Ville Habitée où il était admis ce principe de la liberté de conscience et de parole de chacun face à son association d’origine. Ce qui leur fut reproché plus tard (après l’expulsion de l’hôtel St Jean), c’est d’avoir provoqué et entretenu un climat de méfiance qui aurait entraîné des réflexes de défense aboutissant à une récupération politique, presque « involontaire ».
Il fallut attendre presque une année pour que certains au sein de Planète en danger admettent l’inadmissible. Il fallut que s’accumulent des témoignages accablants, comme celui du porte-parole des familles de la Ville Habitée, membre du
D.A.L 31, expliquant comment il participa à des réunions de commissions de la L.C.R. (en théorie totalement absente du collectif) où se discutaient les positions que devait adopter le D.A.L. 31 dans le cadre de la Ville Habitée.
Les désaccords au sein de l’association Planète, la difficulté à prendre la mesure des manoeuvres de récupération politique, et l’impossible frontière entre relation individuelle et investissement politique des uns et des autres..., tout cela explique peut-être pourquoi cette expérience fut aussi douloureuse, et pourquoi de réelles divergences sur le fond se réduisirent, surtout vue de l’extérieur, à d’apparentes querelles de personnes.

LES TENSIONS ET DESACCORDS A PROPOS DE L’AXE LOGEMENT.
Pour les membres de Planète en Danger investis dans l’écriture de ce projet, l’axe logement correspondait à la volonté d’appréhender dans sa globalité les problèmes liés à ce thème ( par ex. : division de l’espace urbain entre zone marchande /zone dortoir; impact sur les comportements sociaux de logements trop petits, trop chers, trop cloisonnés; les liens entre urbanisme, racisme, violence, mal de vivre, ennui, suicide; le problème d’identité culturelle des villes, etc). L’exigence du D.A.L. 31 que soit inscrite une revendication concrète, l’application de la loi de réquisition, présentait de nombreux inconvénients, non seulement pour l’ensemble des membres de Planète mais aussi pour des membres de Ras l’Front et de Lucette Omnibus. Nous pensions que cette revendication présentait le risque d’une lecture extérieure faussée de ce projet, celle d’un projet intellectuel abstrait destiné à accompagner une action politique claire et précise. La proposition de certains que soit inscrite des revendications « contrepoids » dans les autres axes fut rapidement écartée sur l’argument que la Ville Habitée se voulait cette étape préalable, cette rencontre, dont peut-être sortiraient des formes d’organisation et des revendications précises.
Pour l’heure, en particulier pour l’axe « Art et Culture », l’urgence était la réflexion et la rencontre entre les acteurs de ce milieu, trop peu ou trop mal organisés pour émettre des revendications pertinentes. De plus, la loi de réquisition n’était pas forcément considérée par tous comme une solution valable. L’exigence du DAL que soit inscrit dans le projet une revendication (application de la loi de réquisition) risquait selon nous de masquer son caractère expérimental et ouvert, en fournissant au médias et au public un axe de lecture classique simple et concret, d’un projet en fait complexe et fragile. Le risque fût accentué lorsque le DAL national occupa un immeuble rue du Dragon (à une époque où le projet Ville Habitée était pratiquement rédigé). Les sans logis devinrent un sujet hautement médiatique.
C’est après de longs débats que l’inscription de la revendication de la loi de réquisition fut acceptée. Posée comme condition de la participation à ce projet du D.A.L.31, elle fut l’objet d’un compromis, jugé utile au maintien de l’équilibre entre le pôle politique et le pôle culturel.

APPORT CRITIQUE D’UNE CINQUIEME ASSOCIATION : LE G.A.F.
Dire que le projet « La Ville habitée » fut élaboré et conçu par 4 associations est inexact dans la mesure où un individu, membre de l’Atelier des Arpètes participa activement aux discussions et à la rédaction du document de base.
De même une cinquième association faillit in-extrémis porter de 4 à 5 le nombre des initiateurs de ce projet. Nous contactâment et rencontrâment courant nov 94, une association qui avait une pratique et une réflexion importante sur l’axe logement et sur l’axe art et culture. De plus, cette association est majoritairement constituée d’individus qui ont connu la rue. Le G.A.F.(Groupe Amitié Fraternité), fut d’un apport critique excessivement pertinent concernant notre projet. Ses membres nous amenèrent à réfléchir, entre autre, sur les dangers et la complexité d’un projet qui implique des situations humaines, et qui peut fragiliser voire bouleverser des existences. Le flou du projet concernant ces questions épineuses fit qu’ils refusèrent de faire aprtie de l’équipe de base. Ils firent certainement le bon choix, eu-égard à la façon dont, selon-nous, certaines « familles » furent utilisées. Elle fit tout de même partie du collectif en créant d’ailleurs une association spécifique le G. A. G. (Groupe Action G.A.F.). Signalons que depuis l’expulsion de La Ville Habité, cette association a mené plusieurs actions, en particulier autour de l’occupation de lieu et sur l’axe logement, mais pas uniquement. Son approche de cette question reste pour nous exemplaire, même si elle est beaucoup moins médiatique que d’autres. Nous invitons ceux qui s’interrogent sur l’efficacité de la réquisition de logements vides comme solution pour palier la détresse humaine, à rencontrer les membres du G.A.F.

TENSIONS ET DÉSACCORDS - AU SEIN DES QUATRE DE BASE - SUR LE NOMBRE ET LE RÔLE DES « FAMILLES ».
La présence de « familles », de mal-logés occupants des logements à l’intérieur du lieu qui serait investit, était source d’interrogations et d’un conflit qui opposa Planète en Danger au D.A.L. 31.
Nous pourrions aborder aussi la question épineuse du choix du lieu et la pratique du secret si caractéristique de certaines organisations d’extrême gauche, qui fut adoptée, et conduisit à occuper l’hôtel St Jean sans avoir pris la mesure du danger que représentait le fait qu’il soit classé « monument historique ». Cette pratique du secret et du cloisenement fut au coeur de la question des familles. Aucune des personnes autour de la table où fut discuté et pensé le projet « Ville Habitée », ne pouvait être qualifiée de « sans-logis », de « mal-logée » ou d’« exclue ». Les membres de Planète en Danger étaient unanimes pour refuser que des humains, quelle que soit leur situation, soient utilisés, mis au service de causes ou de stratégies politiques. Le fait que l’expérience « Ville Habitée » occupe un lieu pendant deux mois, nous interdisait de faire du logement autre chose qu’un axe politique, expression de notre solidarité avec les mal-logés et les sans-logis. Le logement symbolique de « familles » sur le site était pour nous la mise en avant d’un dysfonctionnement grave de notre société, et non la volonté de pallier ce dysfonctionnement par notre action concrète. Engager des familles en difficulté dans un projet de deux mois, nous semblait dangereux, sauf si chacune d’elle participait en connaissance de cause, était partie prenante de l’aventure et adhérait à la dynamique globale du collectif. Dès l’origine du projet, il était clairement posé que le nombre des « familles » serait restreint à 3 ou 4. Ce nombre, surtout après les discutions avec le G.A.F, serait surtout conditionné à notre capacité de suivi, matériel et affectif, dans le cas où nous serions expulsés.
Quelques semaines avant la prise de l’hôtel St Jean, les membres de Planète en Danger inquiets face aux pratiques et sur le principe de « recrutement » de familles mis en place par le D.A.L.31, se réunirent et exigèrent que le nombre des familles soit clairement fixé et identifié. Devant le flou qui perdurait, confrontés au succès que commençait à connaître le
31, suite à la dynamique autour de la Ville Habitée, et au retentissement médiatique de l’occupation de la rue du Dragon et inquiets par le choix du lieu, craignant de plus en plus d’être l’objet de calculs politiques, ils tentèrent de débloquer la situation en demandant qu’une seule famille soit logée de façon symbolique au sein de la Ville Habitée. Au souhait de Planète qu’une seule famille soit partie prenante de l’aventure, le D.A.L .annonça par l’intermédiaire d’Isabelle Ricard, que l’objectif de cette association était maintenant au contraire la présence d’un maximum de famille. S’en suivit un lamentable marchandage téléphonique entre Isabelle Ricard et Marc Lefebvre où la représentante du D.A.L. expliqua au représentant de Planète en Danger que les 3 ou 4 familles, dont il était question depuis le début de ce projet, devaient dans notre esprit correspondre à 12 ou 15 personnes. Elle expliqua que stratégiquement et médiatiquement pour le D.A.L., 12 ou 15 personnes représentaient 12 ou 15 familles. Le conflit fût rude à l’intérieur de Planète entre partisans de la confiance et partisans de la crise ouverte. Nous avons fait à ce moment-là le pari que l’inévitable polarisation médiatique sur l’axe logement et sa réduction au problème des sans-logis serait de courte durée, et que l’originalité, la globalité et la notion d’expérience s’imposerait avec le temps.

PRISE ET EXPULSION DE L’HÔTEL ST JEAN. LA CRISE ÉCLATE.
La présence surprise de deux personnalités, membres du D.A.L. national, (M. Bretau et M. Amarra, présents le matin de la prise du lieu, qui firent une prise de parole « officielle » dés la prise du lieu) et la présence non consensuelle du professeur Léon Scharzenberg, furent lues par certains membres de Planète (et d’autres) comme le signe évident que des stratégies avaient été élaborées par delà le collectif d’associations. Le principe du consensus n’avait pas été respecté et l’expérience toulousaine « Ville Habitée » se voyait représentée médiatiquement par les grands frères parisiens. L’expulsion musclée de l’hôtel St Jean fit éclater une crise latente qui sera caricaturée et enfermée dans l’affrontement des défenseurs de l’axe logement et ceux de l’axe culturel.. Cette expulsion, et l’action volontaire de militants politiques, transforma l’utopique projet « la Ville Habitée » en un mouvement politique classique au profit d’une revendication précise et unique : la loi de réquisition. Nous assistâmes quelques jours après l’expulsion à une manifestation ubuesque : 50% des troupes stationnant devant le capitole sur le thème global du projet et 50% entrainés en manifestation derrière le D.A.L. 31 sur le slogan « Un toit, c’est un droit »
Planète en Danger, au coeur de la tourmente, ne sût réagir. Les tensions en son sein étaient très fortes. Les uns accusèrent les partisans de la confiance d’avoir fait preuve d’une naïveté terrible, les autres accusant ceux qui étaient méfiants d’avoir provoqués des comportements de récupération.
Le milieu culturel se sentit utilisé et abusé. Il reprocha à Planète en Danger de ne pas l’avoir informé des risques de manipulations politiques, et pire d’en avoir été le complice. Son réflexe fût de fuir.

L’APRÈS EXPULSION - LA REPRISE SYMBOLIQUE DE L’HÔTEL ST JEAN.
Après l’expulsion de l’hôtel Saint Jean, le D.A.L. 31 mena rapidement une action spécifique au logement en « réquisitionnant » un immeuble désaffecté. Il demanda à cette occasion de bénéficier des finances de la Ville Habitée. Cela fut pour nous le signe de la volonté manifeste de désigner la direction raisonnable que devait désormais emprunter le collectif de la Ville Habitée. Ce fut aussi lu comme la tentative, dans le cas d’un refus, de désigner Planète en Danger (gestionnaire du compte) comme responsable des divisions et querelles qui étaient maintenant le quotidien des discutions sur la Ville Habitée. Le refus catégorique et immédiat de satisfaire à cette demande, exprimé en particulier par Lucette Omnibus et par le G.A.F. évita une nouvelle dégradation du climat.et fut le signe de la volonté de quelques uns de poursuivre l’aventure.
Nous étions (mars-juin 95) dans une situation très floue. Personne hormis l’association AYDA n’avait clairement abandonné le projet. Le D.A.L. et AC avaient « pris leurs distances » et menaient leurs actions spécifiques. Pourtant seules 7 associations, plus quelques individus, continuaient de se réunir régulièrement autour du projet. Nous n’avions aucun moyen de savoir qu’elle était la volonté réelle des uns et des autres de poursuivre l’aventure. Les 7 associations décidèrent de réaliser une reprise symbolique de l’hôtel St Jean (occupation des toits pendant 24 heures) afin de juger de l’intérêt que suscitait encore le projet. Vu le peu d’enthousiasme et le nombre réduit des participants, nous décidâmes de ne plus prendre d’initiative et cessâmes de nous réunir.

DERNIERS SOUBRESAUTS
Sans l’avoir voulu, Planète en Danger commis l’erreur d’accepter l’ouverture d’un compte en annexe du sien pour gérer les finances de la Ville Habitée. Après que les dernières réunions eurent cessées et que la commission finance ai remboursé tous les frais, il restait environ 34 000 francs bloqués sur ce compte. Les rumeurs allant bon train, concernant un détournement possible de cette somme par Planète en Danger, l’association décida de prendre une ultime initiative, celle de ne plus être responsable de cet argent. Le résultat de la réunion au CIDES du 11 décembre 1996 dont l’objet était de décider du sort de cet argent, signe semble-t-il la fin définitive de l’utopique Ville Habitée. (cf lettre du 05 février 1997 de Planète en Danger aux 30 associations du collectif).

CONCLUSIONS
Pour l’association Planète en Danger elle-même : Le bilan est globalement très négatif : arrêt de nos activités spécifiques durant une année, mise en sommeil du projet et des travaux sur le lieu que nous occupons, nombreuses tensions et découragements , départ de certains membres, une image de l’association salie dans le milieu toulousain de la militance, usure des personnes faces à des attaques souvent personnelles. Lassitude!
D’un point de vue plus global:
La Ville Habitée qui avait comme origine un désir d’ouverture vers ceux qui ne fréquentent pas ou peu les milieux militants ou artistiques, s’est finalement engluée dans les querelles internes si caractéristiques de ces milieux. Néanmoins, parmi les aspects positifs nous notons :
-Les rencontres nombreuses entre individus et groupes qui donnèrent lieu à plusieurs initiatives sur cette ville. D’un certain point de vue, le brassage des réseaux a fonctionné, en particulier au moment fécond de l’élaboration de ce projet et de sa préparation.
-Le D.A.L. 31 a put grâce à la dynamique que lui a amené cette expérience prendre son vol et mener des initiatives nombreuses. Cela a peut-être permis l’amélioration de certaines situations humaines.
-De nombreuses réflexions semblent parcourir l’espace associatif avec plus de vigueur depuis cette expérience.
Nous avons le sentiment que ce projet n’a pas été compris dans sa globalité et son originalité. Peut-être était-il trop flou, trop ouvert...Peut-être a-t-il fonctionné car il était très flou, très ouvert,...Il a permis à beaucoup de gens de rêver, d’entrevoir des perspectives, de participer à d’autres dynamiques.
Parmi les leçons que nous a apportée la Ville Habitée :

- La certitude et non plus l’intuition du potentiel d’énergie énorme que représente la rencontre les milieux associatifs et culturels sur Toulouse.

-La mesure que nous avons prise de l’état d’inorganisation caractéristique du milieu culturel toulousain, et son manque de patience dans l’action collective.

- La nécessité d’être particulièrement vigilant et informé des pratiques et des identités des organisations politiques, dés qu’une dynamique peut d’une façon ou d’une autre représenter un enjeu politique, mettre des gens dans la rue.

Notre regret restera sans doute quil n’ai pas été entrepris un bilan sérieux et constructif, une tentative pour comprendre pourquoi à moment donné autant de gens se sont pris à rêver d’une Ville Habitée.

La Ville Habitée

Repères chronologiques

Messagepar La Ville Habitée » mar. 15 sept. 2009 12:26

LA VILLE HABITÉE - REPÈRES CHRONOLOGIQUES.

-avril 1994 : hasard de la rencontre : des membres de Lucette Omnibus, de l’Atelier des Arpètes et de Planète en Danger, se croisent sur le site désaffecté de l’ancienne fac de pharmacie. Émergence d’une idée folle : investir cet endroit.
-mai 1994 : 1er contact informel concernant une éventuelle occupation collective de l’ancienne faculté de pharmacie avec quelques individus de Lucette Omnibus ( 7 photographes qui mènent des actions communes ) , et une personne du D.A.L. 31 ( 7 personnes , principalement des travailleurs sociaux, mobilisés sur le principe de la réquisition de logements vides.).
-juin 1994 : rencontre D.A.L./Planète autour d’un pique-nique à la Chapelle.
-septembre 1994 : le projet semble abandonné. Lucette Omnibus est peu mobilisée, le D.A.L. 31 a scissionné, ils ne sont plus que trois.
-octobre 1994 : le projet redémarre. L’association Ras l’Front ( une quarantaine de personnes qui militent sur le thème de l’anti-fascisme ) se déclare intéressée.
-de la mi-octobre au 30 janvier 1995 : les 4 associations -Ras l’Front, Dal 31, Lucette Omnibus, Planète en Danger vont se rencontrer au minimum une fois par semaine à la Chapelle pour imaginer, définir et écrire le projet « La Ville Habitée », (cf: texte en annexe.). A ces réunions participeront un individu ( Pascal de l’atelier des Arpètes) ainsi qu’une cinquième association ( le G.A.F. - groupe amitié fraternité -proche du Secours Catholique, constitué par des gens de la rue sur la problématique de la rue. Cette association qui a mis en place des ateliers culturels originaux, ainsi qu’une bibliothèque pour les gens de la rue, travaille aussi beaucoup sur le thème du logement.).
-30 janvier 1995 : réunion de présentation du projet (au café théâtre Le Bijou ) à la cinquantaine d’associations qui s’est déplacée. Création du collectif d’associations « La Ville Habitée ».
-du 08 février au 18 mars 1995 : travail en commission à la Chapelle afin de préparer l’occupation d’un lieu pendant deux mois . Environ 100 à 150 personnes se répartissent sur une AG hebdomadaire et sur cinq commissions : Lieu de parole / Vie quotidienne, intendance / Relations extérieures, contacts presse / Programmation et organisation des activités, de l’espace, et relations avec les divers partenaires / Méthodologie des prises de décisions sur le lieu, et problèmes juridiques.
-01 mars 1995: désignation de trois porte-paroles du projet - Marc Bernard de Ras l’Front, Isabelle Ricard du D.A.L.31 et Marc Lefebvre de Planète en Danger.
-11 mars 1995 : Fête de soutien au projet « La Ville Habitée ». Elle a lieu à la chapelle, et environ 500 personnes y participent.
-15 mars 1995 : dernière assemblée générale du collectif à la chapelle. Bien qu’il avait été décidé qu’aucune personnalité nationale ne serait représentative ou porte-parole du projet, le D.A.L.31 informe le collectif que le professeur Léon Schartzenberg viendra nous soutenir à titre personnel le jour de la prise du lieu.
-18 mars 1995 : Prise du lieu. 7h00 -rendez-vous à la chapelle de l’équipe chargée de l’encadrement de la manifestation aboutissant à la prise du lieu, dont l’adresse tenue secrète jusqu’à ce jour lui est communiquée. Découverte de la présence surprise de M. Amara -président du D.A.L. national-et de M. Bertaud -avocat du D.A.L. national. 10h00 - rassemblement place Esquirol d’environ 600 personnes. 11h00 -occupation de l’hôtel St Jean, ancienne école de commerce. 12h00 -assemblée générale dans la cour de l’hôtel St Jean. Prise de parole des personnalités parisiennes et des porte-paroles de la Ville Habitée. Organisation sur le lieu : installation des « familles », mise en place d’un accueil, démarrage du lieu de parole,
installation d’expos, lectures publiques, aménagement et mise en chantier du site... Soirée festive, environ 1500 participants.
-Dimanche 19 mars 1995 : 7h00 du matin, expulsion musclée par les forces de l’ordre. après-midi, manifestation dans les rues de Toulouse, environ 2000 personnes.
-lundi 20 mars 1995 : réunion publique houleuse à la Chapelle. Le D.A.L. 31 est accusé de tenter de récupérer le mouvement en désignant l’axe logement comme l’axe prioritaire de ce projet. Environ 700 personnes sont présentes. Le Dal, accusé d’être manipulé par un groupe politique : la L.C. R, quitte la salle.
-samedi 25 mars/01 avril ? 1995 : manifestation place du Capitole. Environ 100 participants. 50 d’entre eux partent en défilé derrière le D.A.L. 31 et les 50 autres restent place du Capitole.
-29 mars 1995 : réunion à la Casa Catala où l’association AYDA annonce son retrait du projet « Ville Habitée », AC ! qu’elle envisage de se retirer mais n’a pas encore pris de décision, et le D.A.L. 31 précise qu’il s’éloigne du collectif pour mener ses propres actions tout en restant attaché au projet.
-mercredi 30 mars 1995 : réunion publique houleuse à la fac du mirail. Environ 200 participants.
-18 mai 1995 : conférence-débat introduite par M.L. Sala Molins « La revendication en terme de droit ». Environ 130 personnes participent à cette soirée à la chapelle.
-du 20 mars au 10 juin 1995 : 7 associations continuent de se réunir, les Explorateurs du temps réel, I.M.P.C., Ras l’Front, G.F.E.N., la Sauce, U.N.C.S., Planète en Danger et des individus de la Ville Habitée. Le Dal, fort de la mobilisation que lui a amené la Ville Habitée, mène ses actions propres (ouverture du squat du verrier).
-10 juin 1995 : le mariage de la Ville Habitée. Les quelques associations qui tentent de continuer le projet Ville Habitée reprennent symboliquement les toits de l’hôtel St Jean durant 24 heures afin d’avoir la réponse à la question : La Ville Habitée mobilise-t-elle encore ? Eu égard au peu de soutien dont bénéficiera cette initiative ( quelques centaines de personnes) , le collectif cesse de se réunir.
-11 décembre 1996 : Réunion au Cides sur le reliquat financier qui s’élève à 34 000 F, gérés par Planète en danger. Toutes les associations adhérentes au collectif de « La Ville Habitée » ont été convoquées par courrier. Sur les 30, 7 sont présentes : AC !,Canal Sud, D.A.L. 31, Ras l’Front, la Sauce, U.N.C.S., Planète en Danger. L’une, I.M.P.C. ayant quittée la région, s’exprimera par courrier. Il faut rajouter la présence d’une personne à titre « d’individu de la Ville Habitée ». Il a été décidé à cette réunion :
-L’envoi d’une proposition de remboursement de la mise de départ à chaque association. -Le dédommagement de deux personnes qui ne l’avaient pas été à l’époque par la commission finance pour absence de justificatif ( environ 4 000 et 5 000 F).
La somme restante sera partagée comme suit : -50 % de celle-ci sera versée aux quarante individus du collectif des Sans-papiers. -50 % seront sous l’autorité de Canal Sud attribués pour des projets concrets à trois squats toulousains : Le Clandé, La Ferme, La Crémerie.